Les mares et les lacs de l’île Bylot : puits ou sources de GES?

décembre 22, 2015 dans Article par Godin.E

Première étude sur l’âge des GES émis par les systèmes aquatiques dans l’Arctique canadien

*crédits: http://www.ete.inrs.ca/actualites/premiere-etude-age-ges-systemes-aquatiques-larctique-canadien par Gisèle Bolduc*

Pour la première fois, des chercheurs ont déterminé l’âge du dioxyde de carbone (CO2) et du méthane (CH4) émis par les mares et les lacs de l’île Bylot au Nunavut. Ils ont observé des différences significatives quant à l’âge et au taux d’émission de ces gaz à effet de serre (GES) provenant de ces écosystèmes aquatiques situés en zone de pergélisol. Ces résultats sont publiés dans un article de la revue internationale Biogeosciences, dont le premier auteur est le chercheur postdoctoral Frédéric Bouchard du Centre Eau Terre Environnement de l’INRS et du Département de géographie de l’Université de Montréal.

Les échantillons de gaz prélevés au cours de l’été ont révélé que l’âge et les taux d’émission de GES varient beaucoup d’un plan d’eau à un autre selon la taille et la profondeur. Par exemple, les mares peu profondes émettent du gaz datant de quelques siècles au plus et qualifié de plutôt « jeune », selon les datations au carbone-14. Certaines d’entres elles, recouvertes d’un tapis de cyanobactéries, constituent des puits de CO2 et des sources de CH4, alors que d’autres mares, dont les berges sont en érosion, sont des sources importantes des deux gaz. Quant aux lacs, ils libèrent des GES beaucoup plus âgés, jusqu’à près de 3 500 ans pour le CH4, mais à un rythme plus lent, du moins l’été.

« Cette étude montre l’importance des effets combinés des propriétés géomorphologiques, limnologiques et hydrologiques des écosystèmes aquatiques sur les émissions de CO2 et de CH4 provenant du dégel du pergélisol », indique la professeure Isabelle Laurion .

L’approche de l’équipe de recherche a permis de discriminer la contribution de deux types d’émission des GES : la diffusion et l’ébullition. C’est ainsi que les chercheurs ont constaté que la diffusion pourrait être sous-estimée, en particulier dans le cas des mares. Jusqu’à présent, c’était plutôt l’ébullition qui était considérée comme le processus dominant des émissions de CH4 par les systèmes lacustres.


« Cette étude novatrice sur l’âge des GES émis en Arctique canadien est l’une des rares études concernant les lacs situés ailleurs qu’en Sibérie ou en Alaska. Elle jette un nouvel éclairage sur le rôle spécifique des différents types d’écosystèmes aquatiques sur la dynamique du carbone associée à la dégradation du pergélisol et sur leur répercussion potentielle sur les changements climatiques à venir », souligne le chercheur Frédéric Bouchard. Elle pave la voie aux futures études qui devront non seulement mesurer les échanges gazeux, mais aussi tenir compte de l’âge du carbone émis, car cela influence grandement leur capacité d’agir comme un mécanisme de rétroaction positive sur le climat.

À propos de la publication

Cette recherche a été réalisée par Frédéric Bouchard, Isabelle Laurion , Vilmantas Prėskienis, tous trois du Centre Eau Terre Environnement de l’INRS, Daniel Fortier de l’Université de Montréal, Xiaomei Xu de l’University of California et Michael J. Whiticar de l’University of Victoria. L’article «Modern to millennium‐old greenhouse gases emitted from ponds and lakes of the Eastern Canadian Arctic (Bylot Island, Nunavut)» vient de paraître dans la revue internationale Biogeosciences. ArcticNet, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), le Programme du plateau continental polaire de Ressources naturelles Canada, le programme Frontières de la découverte du CRSNG, le programme de formation EnviroNord et la W. Garfield Weston Foundation ont soutenu financièrement les travaux de cette équipe de recherche.

Bouchard F, Laurion I, Pr, Prèskienis V, Fortier D, Xu X & Whiticar MJ (2015) Modern to millennium-old greenhouse gases emitted from ponds and lakes of the Eastern Canadian Arctic (Bylot Island, Nunavut) . Biogeosciences 12(23):7279-7298. DOI : 10.5194/bg-12-7279-2015

Ce message est également disponible en : Anglais

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